L’histoire des machines à sous

2.

L’histoire

Maintenant que la question de l’appellation, un petit peu fastidieuse j’en conviens, est enfin définie avec précision, il est temps de passer à un sujet beaucoup plus intéressant. J’ai choisi de vous parler tout de suite de l’histoire des machines à sous et de réserver les points plus terre à terre comme par exemple les règles du jeu et les stratégies pour plus tard; de manière à faire une pause après un chapitre riche en termes techniques avant de passer à d’autres parties toutes aussi remplies de mots barbares.

Découvrons donc ensemble l’histoire des bandits manchots longue de plus d’un siècle. Elle se révèle riche en rebondissements de toutes sortes comme vous allez pouvoir vous en rendre compte par vous même à travers les paragraphes suivants.

Tout commence aux Etats-Unis à la toute fin du 19ème siècle, en Californie dans la région de San Francisco. Le décor est posé. Passons maintenant aux faits précis qui ont participé à la naissance du jeu de casino qui nous intéresse à travers cette page web, à savoir les fameuses machines à sous.

2.1.

Les précurseurs

Dans le dernier paragraphe, je vous ai un tout petit peu menti puisque avant de parler du célèbre Charles August Fey et de sa cultissime Liberty Bell, première machine à sous de l’histoire, il convient quand même d’évoquer rapidement ses précurseurs.

Nous restons toujours en Amérique mais devons passer de la côte Ouest à la côte Est direction le quartier de Brooklyn à New York. C’est en effet là-bas que prospère la société Sittman and Pitt qui développe différents appareils de jeu.

Au cours de l’année 1891, l’entreprise conçoit une nouvelle machine qui préfigure les slots modernes. Dotée de cinq tambours détenant des cartes à jouer, elle est basée sur un principe proche du poker et peut faire penser au video poker actuel. Pour gagner, vous deviez donc parvenir à former une main de poker. Avec une paire de rois par exemple, le joueur recevait une bière gratuite tandis qu’une quinte flush royale rapportait des cigares ou une boisson plus prestigieuse. En effet, ces appareils étaient placés dans des bars. De manière à favoriser la banque, deux cartes étaient généralement retirées de la machine: le 10 de pique et le valet de cœur. Néanmoins, certains établissements réduisaient encore davantage les chances de gagner. Cela n’a pas empêché ce type d’appareils de remporter un grand succès.

Il faut aussi parler des roulettes automatiques, développées notamment par la firme Gustav Shultze. En effet, c’est grâce à elles que l’inventeur des machines à sous modernes a l’idée de concevoir un nouveau type de jeu. Mais, ne brûlons pas les étapes puisque tout cela vous sera détaillé ci-dessous dans le prochain paragraphe.

2.2.

Charles August Fey et Liberty Bell

Né à Vöhringenen Bavière le 9 septembre 1862, Charles August Fey n’a que 23 ans quand il décide de suivre son oncle qui déménage dans l’Etat américain du New Jersey. Puis, il voyage aux quatre coins des Etats-Unis pour finalement s’installer à San Francisco, en Californie, où il commence à travailler pour la société California Electric Works Company. Quelques années plus tard, il fonde sa propre entreprise spécialisée dans l’équipement électrique et les téléphones avec un certain Theodore Holtz

Depuis sa tendre enfance, Charles August Fey a toujours été attiré par la mécanique. Une fois domicilié en Californie, il se passionne pour les roulettes automatiques. D’ailleurs, il fabriquera son propre modèle en 1894 sous le nom de Horseshoe (Fer à cheval pour les moins anglophone d’entre nos lecteurs).

C’est au cours de l’année 1898 qu’il conçoit la toute première machine à sous dotée de rouleaux. Il l’intitule Card Bell puis la perfectionne l’année suivante pour créer le célébrissime modèle Liberty Bell. Ce dernier propose une série de symboles comme le carreau, l’as de pique, le cœur, le fer à cheval et la fameuse cloche de la liberté. Le principal point fort de cet appareil réside dans le millier de combinaisons possibles puisqu’auparavant seule une centaine pouvait être obtenue.

Immédiatement, la machine à sous Liberty Bell rencontre un immense succès. Sa popularité est telle que Charles August Fey va lancer une nouvelle société intitulée Slot Machine Factory pour parvenir à répondre à la demande. Bien évidement, cela attire la convoitise de certains et une concurrence s’organise. Comme l’inventeur des slots ne veut pas commercialiser son brevet, les autres entreprises sont contraintes de développeur leurs propres modèles. Puis, au cours de l’année 1905, un exemplaire de Liberty Bell est dérobé. Il va permet à un nouveau fabricant Mills, qui décortique l’appareil pour comprendre son fonctionnement, d’apparaître sur le marché en lançant une machine particulièrement proche. D’autres firmes suivent son exemple, telle Caille notamment. C’est la naissance de toute une nouvelle industrie : celle de la création des machines à sous.

2.3.

La prohibition

Si je vous parlais à l’instant, à travers le paragraphe précédent, du marché florissant des slots aux Etats-Unis. Sachez que ce dernier ne va pas durer très longtemps puisqu’il est vite stoppé par la mise en place de la prohibition qui interdit, outre la consommation d’alcool, tout jeu d’argent sur le territoire des Etats-Unis d’Amérique. Bref, il s’agit d’une très sombre période.

Le premier Etat à limiter les ventes de boissons alcoolisées fut le Maine en 1851. Quatre ans plus tard, 13 Etats appelés dry states adoptèrent des mesures établissant la prohibition. Il faut néanmoins attendre le 29 janvier 1919 pour que l’interdiction soit établie à l’échelle nationale par le 18ème amendement de la Constitution des Etats-Unis. La même année, elle est entérinée par le Volstead Act du 28 octobre. Mais, ce n’est que le 16 janvier 1920 que la prohibition entre véritablement en vigueur. A partir de cette date, il n’est donc plus possible de miser de l’argent de n’importe quelle manière que ce soit dans tout le pays. Cela freine logiquement le développement de l’industrie des machines à sous mais grâce à une idée ingénieuse certains acteurs parviennent quand même à continuer d’exister.

C’est le cas notamment de Mills. L’entreprise a en effet la bonne idée d’adapter chaque machine à sous de son catalogue en distributeur de friandises amélioré. Lorsque le client achète des bonbons, il déclenche du même coup la rotation des rouleaux. S’il parvient à obtenir une combinaison de symboles gagnante, il empoche alors un jeton pouvant ensuite être échangé contre des boissons ou d’autres petits lots. A l’occasion de ce recyclage, les slots adoptent de nouveaux items représentant des fruits. Les symboles prune, orange, citron, cerise ou encore menthe font ainsi leur apparition. On peut en découvrir encore de nos jours dans de nombreuses machines à sous modernes.

Pendant toutes les années de la prohibition, les opposants à cette interdiction sont nombreux comme par exemple l’AAPAA (Association Against the Prohibition Act Amendment ou association contre l’amendement de la prohibition en bon français). Pointant du doigt la limitation des libertés individuelles, l’inefficacité de la loi, le manque à gagner sur les taxes et l’augmentation du chômage ayant débouché sur la crise de 1929, ils parviennent à convaincre le président Franklin Delano Roosevelt. En avril 1933, ce dernier abroge finalement le Volstead Act qui jusqu’alors justifiait et définissait la prohibition. La vente et la consommation d’alcool redeviennent donc légales, dans la plupart des Etats, mais les jeux d’argent continuent à être interdits.

2.4

La création du Flamingo et le développement de Las Vegas

Le krach boursier de 1929 et le projet de construction du barrage Hoover ont conduit le Nevada à légaliser les jeux d’argent sur son territoire de manière à engranger des recettes fiscales supplémentaires. C’est au cours de l’année 1931 que l’Etat autorise la plupart des formes de jeu lorsque l’Assembly Bill 98 est voté.

Les machines à sous signent donc leur retour officiel sur le devant de la scène dans les casinos qui fleurissent un peu partout au Nevada. Néanmoins, le succès de ces établissements reste encore assez discret puisque la population de l’Etat est faible et que le tourisme n’est pas aussi développé qu’aujourd’hui.

Après la seconde guerre mondiale, le pouvoir d’achat des américains augmentent ce qui permet le développement de ce secteur d’activité. En outre, les lois entourant les jeux d’argent deviennent encore plus strictes dans la plupart des Etats. Ainsi,l’industrie des casinos du Nevada se développe et commence à attirer le grand banditisme qui pourrait bien tirer partie de ce type d’établissement pour le blanchiment d’argent sale notamment.

Le premier mafieux à s’intéresser sérieusement à la question se nomme Benjamin Siegelbaum. Plus connu sous le nom de Bugsy Siegel, il appartient à la Yiddish Connection. C’est en 1945 qu’il découvre un village perdu dans le désert appelé Las Vegas. Il a alors l’idée d’y construire un complexe luxueux dédié aux jeux d’argent. Ce sera chose faite l’année suivante avec l’inauguration du célèbre Flamingo, le 26 décembre. Contrairement à ce que beaucoup pensent, il ne s’agit pas du premier casino de la ville mais il s’impose à n’en point douter comme la première étape de la fondation d’une oasis de divertissement au milieu de nulle part.

Doté de 105 chambres, le Flamingo est situé à 11 km du Downtown de Las Vegas sur une artère qui deviendra le célèbre Strip. A l’époque, il était considéré comme l’hôtel le plus luxueux du monde et proposait de nombreux divertissements, un très beau jardin et de magnifiques piscines.

Ce projet, vu comme le moyen de gagner de fortes sommes par des moyens légaux, intéressait le syndicat du crime qui y investit par l’intermédiaire de Meyer Lansky.

2.5.

L’idée de génie de Bugsy Siegel

Certains lecteurs peuvent peut-être se demander pourquoi parler de la création de Las Vegas dans une histoire des machines à sous. Et bien, c’est justement là-bas que les slots parviennent à s’imposer comme les jeux de référence des casinos. Jusqu’ici, elles rencontraient un certain succès mais c’est au Flamingo puis dans les autres complexes de la ville qu’elles deviennent tout bonnement incontournables grâce à une idée de génie de Bugsy Siegel.

Ce dernier va en effet installer de nombreuses slots à côté des jeux de table de manière à permettre aux femmes des joueurs de patienter en attendant le retour de leur mari occupé à s’adonner à la roulette, au blackjack ou encore au craps. Cette stratégie se révèle particulièrement payante puisque les machines à sous sont non seulement jouées par ces dames mais aussi par ces messieurs qui découvrent ou redécouvrent un jeu facile d’accès et amusant qui permet de se détendre entre deux parties de baccarat par exemple.

Devant le succès des slots du Flamingo, les autres établissements de Las Vegas vont également installer massivement ce type d’appareils. Puis, cette tendance sera peu à peu reprise par tous les casinos aux quatre coins de la terre.

Malgré son idée de génie, Bugsy Siegel manque d’organisation et contracta rapidement une dette de plus de six millions de dollars. Lors de la conférence de La Havane, le syndicat du crime décida l’exécution de Siegel, malgré les réticences initiales de Meyer Lansky. Alors que le Flamingo commençait à gagner de l’argent, le mafieux fut quand même abattu dans sa villa de Hollywood, le 20 juin 1947.

Pour les personnes qui s’intéressent à ce sujet sachez qu’un excellent film hollywoodien de 1991 raconte l’histoire de Bugsy Siegel et de la construction du Flamingo. Sobrement intitulé Bugsy, il est réalisé par Barry Levinson avec Warren Beatty, Annette Bening, Harvey Keitel et Ben Kingsley dans les rôles principaux.

2.6.

Des évolutions technologiques

A cette époque, jusqu’aux années 1960, les machines à sous mécaniques sont la norme. Il faut attendre 1963 pour que l’entreprise Bally sorte la toute première slot entièrement électromécanique qui s’intitule Money Honey. Cette dernière possède un trémie sans fond et un monnayeur automatique pouvant accueillir jusqu’à 500 pièces. La popularité de cette machine à sous est telle qu’elle va peu à peu imposer les jeux électroniques dans les casinos.

Il faudra attendre la décennie suivante, celles des années 70, pour que voit le jour la toute première video slot de l’histoire. Développée à Kearney Mesa, un quartier de San Diego en Californie, par N. Cerracchio, R. Greene, W. Beckman, J. Reukes et L. Black sous la direction de la société Fortune Coin Co. basée à Las Vegas, elle sort en 1976. Cette machine à sous remplace les traditionnels rouleaux par un récepteur couleur Sony Trinitron de 19 pouces sur lequel défilent les symboles. Les premiers appareils sont installés au Las Vegas Hilton Hotel. Rapidement, ils s’imposent un peu partout dans les autres casinos du Strip et du centre-ville puis dans le monde entier. La société Fortune Coin Co. et sa technologie innovante sont très vite achetées par International Gaming Technology (IGT) en 1978.

Au cours des années 1980, une nouvelle révolution marque le secteur. Il s’agit de l’invention du générateur de nombres aléatoire que nous évoquerons un peu plus tard. Toujours est il que cet accessoire va abaisser le prix des machines à sous et garantir l’équité des jeux sans aucune possibilité de tricherie ou de manipulation.

Avec l’arrivée des video slots, de nouvelles fonctionnalités peuvent faire leur apparition comme par exemple les jeux bonus aux cours des quels les rouleaux disparaissent pour laisser leur place à un mini-jeu pouvant rapporter un paiement supplémentaire. Ils voient le jour en 1994 sur la machine à sous australienne Three Bags Full. Au cours de l’année 1996, ce type de features est ajouté pour la première fois à un jeu américain, le célèbre Reel ‘Em In développé par WMS Industries Inc. Aujourd’hui, il s’impose au côté des free spins comme les fonctions spéciales les plus répandues des machines à sous mais ne brûlonspas trop vite les étapes puisque ce sujet sera abordé en temps voulu dans la suite de cette page web.

2.7.

Une légalisation tardive en France

Comme vous pouvez vous en rendre compte à la lecture de toute cette partie, l’histoire des machines à sous est longue et mouvementée. Pourtant, je n’ai parlé que des Etats-Unis pour le moment. Ainsi, certains lecteurs peuvent très bien se demander qu’en est-il justement en France. Eh bien, sachez que les slots sont arrivées chez nous assez rapidement mais à partir du mois d’août 1937, la loi interdit l’usage de tout appareil offrant argent ou jeton. Il n’y a que dans le sud-ouest que les machines à sous ont bénéficié, selon les endroits, de quelques dérogations jusqu’en 1981. Pour voir la mise en place d’une légalisation à l’échelle nationale, il faut attendre une loi passée le 5 mai 1987. L’Etat les autorise enfin dans certains établissements.

Cette nouvelle réglementation aura un effet particulièrement bénéfique pour toute l’industrie des casinos français. En effet, elle va permettre aux établissements d’attirer une nouvelle clientèle intéressée par la simplicité d’utilisation et le côté fun des machines à sous. C’est ainsi à partir de la mise en place de cette loi que le marché des casinos hexagonaux va connaître son âge d’or avec un produit brut des jeux qui ne cesse d’augmenter jusqu’à l’année 2008 marquée à la fois par la crise économique internationale, par l’interdiction de fumer dans les lieux publics et par la concurrence toujours plus grande des salles virtuelles de jeux d’argent en ligne mais cela est une autre histoire que nous ne traiterons pas ici.

2.8.

Une adaptation réussie sur Internet

Si je ne parlerai pas à travers ces lignes de la crise que rencontrent les casinos terrestres français à partir de l’année 2008, il convient néanmoins d’évoquer le sujet des sites de jeux d’argent sur Internet et de l’apparition des machines à sous en ligne.

Tout commence en 1994 lorsque les îles des Antilles Antigua et Barbude délivrent les toutes premières licences de casino virtuel de l’histoire. Cinq ans plus tard, la réserve indienne de Kahnawake au Québec propose les siennes. En 2000, ce sont les territoires Britanniques de l’île de Man et de Gibraltar qui s’y collent. Aujourd’hui, il faut aussi compter entre autres avec Malte, Belize, les Antilles Hollandaises ou encore Chypre notamment.

L’histoire des machines à sous en ligne plus précisément débute au cours de l’année 1997 quand l’éditeur sud-africain Microgaming développe la première slot virtuelle. Intitulée Fantastic Sevens, elle s’inspire grandement des bandits manchots mécaniques classiques à trois rouleaux et une seule ligne de paiement. Il faut d’ailleurs attendre l’année 2000 pour que les machines à sous en ligne commencent à s’éloigner de ce modèle traditionnel. Sorti en 2002, le jeu Cash Splash signé Microgaming s’impose comme l’une des premières slots virtuelles à étendre le nombre de ses rouleaux et de ses lignes de paiement.

A partir de cette époque, les éditeurs de jeux de casino en ligne vont redoubler de créativité pour attirer les joueurs. C’est ainsi qu’on a pu assister au lancement de nombreuses machines à sous inspirées de licence forte comme par exemple les célèbres slots de Cryptologic basées sur les comics Marvel.